San-Antonio Chez Les Mac by San-Antonio

San-Antonio Chez Les Mac by San-Antonio

Auteur:San-Antonio [San-Antonio]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
ISBN: 9782265081048
Google: tH6nHAAACAAJ
Amazon: 2265081043
Éditeur: Fleuve Noir
Publié: 1995-01-01T23:00:00+00:00


Je reste très peu de temps seul. Cinq minutes plus tard on gratte à ma porte. Je vais ouvrir et je me trouve en présence d’une Cynthia en Baby Doll qui couperait le souffle à un gonfleur automatique. Oh ! pardon. C’est de la personne de haut luxe. On serait preneur les yeux fermés (mais les mains ouvertes) et on oublierait de réclamer le bon de garantie. Quand elle prend un train de nuit, les chemins de fer britanniques doivent éviter d’accrocher un fourgon de queue !

— Brrr, ces couloirs sont glacials, fait-t-elle en courant à mon lit.

Sans façon elle plonge entre les draps, puis me regarde, amusée par mon expression ahurie.

— Qu’avez-vous, Tony ?

Ce que j’ai ! Les mecs qui jouent les porte-drapeaux dans les défilés militaires l’ont aussi, mais un peu plus haut.

On ne parle pas. On n’a rien à se dire. Le cinéma muet, c’est le plus expressif. Depuis qu’il est devenu parlant, le cinoche est moins éloquent. Alors je me tais. Et je lui projette en début de programme un documentaire sur la Vipère de broussailles, puis comme long métrage, et en grande première mondiale et écossaise : « la main de ma révérende sœur dans la culotte bouffante d’un zouave pontifical ».

J’sais pas si ça vient du climat, mais ce pays m’incite au dévergondage.

J’en suis à la quatrième bobine lorsque soudain Cynthia pousse un petit cri escamoté. J’interromps la séance pour regarder derrière moi, ce qui est assez difficile lorsqu’on pratique les délicates fonctions de projectionniste. Devinez ce que je vois ? Je vous le donne en (Cécil B… de) mille. Un fantôme !

Vous lisez bien, car j’écris bien : un fantôme !

Il est drapé dans un suaire blanc, et il avance lentement dans la pièce. Une lumière verdâtre brille à l’emplacement de sa tête. Il va d’une allure funambulesque, s’approchant de notre lit en un glissement feutré. Cynthia crierait d’horreur si je n’avais le réflexe de lui coller ma main sur la bouche. Surtout pas d’esclandre ! J’aime bien le surnaturel ; il agrémente la vie, mais je n’aime pas qu’il chanstique mes parties de jambons.

Le fantôme se rapproche encore et, soudain, bute sur une chaise. La lumière verdâtre bascule, tombe à terre et le fantôme se met à brailler :

— Oh ! b… de m…, je m’ai cassé le pouce du pied.

J’actionne la lumière. Un Béru bourré est là qui essaie de se dépêtrer de son drap de lit. À ses pieds endoloris gît la petite lampe électrique à feux vert et rouge qu’il serrait entre ses (j’allais dire ses dents) lèvres.

Furieux, je bondis du lit en costume d’Adam soigneusement amidonné, et je le saisis par le revers de son suaire.

— Espèce d’ignoble individu ! Grotesque ! Crétin ! Balourd ! Bas de plafond ! Résidu ! Écueil ! Fond de poubelle ! Demeuré ! Inconscient ! Débile mental ! Bœuf ! Malotru ! Expectoration ! Crasseux ! Minable ! Sous-produit ! Déjection ! Honte humaine ! Déshonneur vivant ! récité-je, passant sous silence les termes qui me paraissent pourtant le mieux convenir à cet être dégénéré.



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